Patrimoine, Strasbourg : la riche histoire des Bains municipaux de Strasbourg

C’est l’actualité de cette fin d’année 2021, à Strasbourg. Les Bains municipaux ont rouvert leur portes le 8 novembre. Et que cela fut longs pour ses habitués, car les Bains municipaux auront été fermés du 22 juin 2018 au 8 novembre 2021. Près de 2 ans et demi durant lesquels les Bains municipaux n'auront pu accueillir les nageurs, trop occupés à y voir se succéder les entrepreneurs pour sa refonte intégrale. Construits entre 1905 et 1908 par l’architecte allemand Fritz Beblo, inscrits aux monuments historiques en 2000, les Bains municipaux de Strasbourg sont un ouvrage illustrant à merveille la politique de développement et d'hygiène, voulue pour Strasbourg par le pouvoir allemand d'alors. Retour plus d'un siècle en arrière.

Remettons-nous dans le contexte du début du XIXème siècle : les bains de rivière sont alors l’unique moyen de pratiquer la natation sportive ou hygiénique. Dans la seconde moitié du XIXème siècle, la révolution industrielle et la ruée des populations vers les villes vont changer la donne, car il faut créer des réseaux de distribution d'eau pour les habitants des villes. Mais avant de réaliser ce chantier titanesque, ce sont des équipements collectifs qui servent aux habitants. Des fontaines, des lavoirs pour la lessive, des étuves pour se laver sont mis à disposition de la population, en attendant que des bains ne voient le jour, dès la fin du XIXème siècle.

Bien conscientes de l'insalubrité qui règne dans la ville de Strasbourg, devenue allemande après 1870, les municipalités successives vont rénover, réhabiliter et moderniser la ville à pas de charge, à l'image de la Grande percée et de la création d'une Neustadt moderne et confortable. Strasbourg doit devenir la vitrine économique et culturelle du nouveau pouvoir allemand, mais aussi un exemple de politique d’hygiène.

Si des bains de rivières, utilisés en été, existent depuis les années 1860, à Strasbourg, la ville va rapidement profiter de nouveaux types de bains, développés à la fin du XIXème siècle, pensés comme des équipements d’hygiène destinés à un large public. On parle de bains de « propreté par aspersion », des douches en somme. Des bains en piscine, à vocation hygiénique et sportive, voient également le jour. L’idée est de promouvoir l’hygiène corporelle, notamment des ouvriers, par la pratique de la baignade. A Strasbourg, les premiers bains-douches municipaux sont ainsi créés à partir de 1893. Ce sont des pavillons modestes, composés d’un corps central, encadré par deux ailes, où hommes et femmes disposent d’une entrée séparée.

Le succès populaire de ces premières installations est incontestable. La municipalité souhaite donc construire un véritable établissement municipal de bains, des avec bassins de natation, sur le modèle des établissements construits dans les grandes villes allemandes d'alors. Le projet choisi pour Strasbourg comprend la construction d’une piscine pour hommes, d’une autre pour dames, de cabines de douches pour la propreté des baigneurs, de 54 cabines individuelles de bains en baignoire, d’une section de bains romains, d’un espace de toilettage pour chiens, de bains médicaux et d’une clinique dentaire. Rien que cela !

C’est en bordure de la Neustadt, non loin de la Grande Île, que les futurs Bains municipaux de Strasbourg seront érigés, boulevard de la Victoire. Le projet de construction est élaboré en 1904, par l’architecte Fritz Beblo, et les travaux débutent l’année suivante. Le bâtiment des bains médicaux et de la clinique dentaire, achevé en 1911, présente un style architectural inimitable, aux nombreuses inspirations et s'inscrit parfaitement dans les projets urbanistiques de la Neustadt. Décrits en Allemagne comme un établissement de référence et considérés par la France comme une réalisation d’excellence, les Bains municipaux de Strasbourg attirent les regards. Le retour de l’Alsace à la France en 1918 permettra d'ailleurs d’en faire le modèle assumé de tous les établissements de bains municipaux français construits dans l’entre-deux-guerres, à commencer par ceux de Paris, de Rennes et de Lyon.